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Fécule 2025 - Les Combustibles

Auxane Bolanz et Erika Castrillón Morales

24 juin 2025 à 16:17:57

Fécule 2025 - Les Combustibles

Les Combustibles, une pièce de théâtre écrite par Amélie Nothomb en 1994, est reprise à Fécule par la troupe Les Barbares. Ils proposent une mise en scène très simple, et pourtant impressionnante par ses six étagères remplies de livres. Dans une pièce où brûler des livres permet de survivre au froid se pose la question des études, et de l’importance du savoir en temps de guerre.


Des livres, des livres, et des livres. C’est tout ce qu’il reste. Et la guerre. C’est à cause d’elle qu’il n’y a rien d’autre. Il ne reste que les livres. Mais quand vient l’hiver, lequel brûle-t-on en premier pour faire le feu ? C’est à cette question que le Professeur, Daniel son assistant, et Marina, la copine de Daniel, doivent répondre alors qu’ils vivent leur deuxième hiver de guerre et qu’il ne reste plus que les livres et deux chaises. Cette scénographie simple est pourtant impressionnante. Au fur et à mesure que passe le temps, les livres disparaissent des étagères, car brûlés pour survivre. Dans un jeu de sarcasme et d'ironie, on rencontre ces trois personnages, qui se posent des questions autour du savoir, tout en tournant certaines de ces situations en comique. Enfermé.e.s dans l’appartement du professeur, iels rient du système universitaire et remettent en question la morale des professeurs et des assistants. Le Professeur dit qu’il ne faut pas se laisser tuer à petit feu par la guerre, qu’il faut résister. Pourquoi continuer à vivre? Pour trouver de l’humour là où c’est possible. Ceci se fait dans les discussions qu’ils auront, souvent à deux, parfois à trois, autour de la prochaine lecture à finir rapidement, car le livre sera brûlé le soir même.

La question est claire: la guerre nous change et nous pousse à nos limites. Le professeur, qui était perçu comme un modèle pour ses élèves, dévoile sa vraie identité au milieu de cette situation bouleversante. Il est présenté comme un personnage misogyne, narcissique et manipulateur. Il a perdu le sens de ses valeurs, car en temps de guerre tout est justifié, affirme-t-il. La  superbe performance de l’acteur.trice met en valeur cette personnalité plurielle. La guerre transforme les gens, leur fait révéler leur vraie nature. Épuisé par la guerre, il avoue à Daniel son amour pour une littérature bête, celle qu’il déprécie devant ses élèves mais qui prend du plaisir en la lisant secrètement.

Cette pièce nous pousse à interroger la manière qu’a chacun·e de vivre en temps de crise. Comment est-il possible de continuer à enseigner et à écouter les professeurs quand on se fait bombarder ? Les personnages dans Les Combustibles se moquent de l’ironie de la situation et interrogent la place des études durant la guerre, sans pour autant arriver à une réponse qui conviendrait à tout le monde. Daniel est stupéfait face à la facilité avec laquelle le Professeur brûle les livres. Ce dernier explique aux deux autres qu’il est presque jouissif de brûler un livre qui a tellement fait souffrir. C’est une forme de vengeance contre les études qui n’est envisageable que par la situation dans laquelle ils se trouvent. Iels remettent en question tout ce qu’on attend de la littérature. Est-elle un déclencheur de changement social ou une simple source de plaisir ? En essayant de déterminer ce que représentent les livres pour chacun d’entre eux.elles, les différences apparaissent clairement. Marina n’y voit qu’un moyen de se réchauffer, alors que Daniel y attache la connaissance qu’il respecte tant. Et puis, les livres ont été brûlés. Il ne reste qu'un dernier livre, le préféré de Marina, la jeune fille semble remettre en question son positionnement, supplie le Professeur. Mais celui-ci n'a aucune pitié, il le brûle dans une dernière flambée. Alors, sans les livres et le savoir qu’ils représentent, il ne reste que la mort.


Les Combustibles, par la Compagnie Les Barbares. Texte: Amélie Nothomb

Mise en scène: Hadrien Halter, Lex Rodriguez

Jeu: Virginie Bertoncini, Éloïse Nuoffer, Eva Romero

Régie et musique: Antoine Tappy

Consultant chorégraphie: Théo Krebs

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